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#1 – LE TAO DANS LES
ORGANISATIONS
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MOUVEMENT PERPETUEL
« Ne soyez pas obsédé par la victoire, songez plutôt à ne pas perdre ».
Gichin Funakoshi – Les 20 préceptes du karaté-do
Cette phrase, résume à elle seule ce qu’est le TAO : la Voie. Celle de la Nature. Et les hommes ? Ils ne sont qu’un élément de cette Nature. Maître Funakoshi invitait les pratiquants de karaté à se défaire de la vision binaire : victoire VS défaite.
De ceux qui raisonnaient en ces termes il disait : « Ils jouent dans les branches et le feuillage d’un arbre sans avoir la moindre idée de ce que recèle le tronc. »
Alors si un combat martial ne se définit pas en termes de victoire et défaite, qu’est-ce donc ? Comme le TAO, la réponse est simple (et pas simpliste !) : c’est UN POLISSAGE DU COEUR. Parfaire cet apprentissage requiert des valeurs spirituelles, une finesse mentale et une présence consciente au monde.
Une entreprise, au même titre que l’homme, fait partie de cette Nature qu’est le TAO. Raisonner en termes de victoire et de défaite y est aussi vain que dans un combat d’art martial. Se focaliser sur le résultat est le meilleur moyen de ne pas l’atteindre.
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CONTROLER LE TEMPS
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Les organisations occidentales se sont construites en cherchant à prévoir le futur. On définit des objectifs chiffrés (CA, marge, parts de marché, …) et ensuite, on se structure de manière à les atteindre. On a vu fleurir ainsi des modèles très hiérarchisés à grand renfort d’indicateurs et de procédures. Aujourd’hui on se rend compte que ça ne marche pas. Pourquoi ? Parce que l’homme est sorti de sa contribution au processus vital de la Nature pour le contrôler. Il s’est trompé de rôle. Il a eu la vanité de vouloir contrôler les lois naturelles.
« Ouais mais ça fait plus de 50 ans que les entreprises fonctionnent ainsi ! ». En effet, c’est le modèle dominant imposé, rigide, auquel les employés comme les managers se sont soumis car il donnait une impression de stabilité. Aujourd’hui, il est vain de résister au temps car tout bouge très vite, tout change en permanence. Alors une organisation figée dans ce grand mouvement continu non seulement n’a plus sa place mais de surcroît se met en danger. Oui, la quête de stabilité est plus risquée que la prise de risque !
Dans la tradition orientale, le chemin est tout autre. On ne cherche pas la pérennité et le résultat. On s’accommode du présent, du temps qui passe et on se transforme en permanence au grès de ce qui advient. C’est une démarche qui vise la fluidité, la connexion au flow. Le TAO. On ne cherche pas à remonter le courant, on suit le flux et on s’appuie sur la force de ce courant. Comme dans un combat d’arts martiaux, celui qui décide de vaincre son adversaire a perdu avant même d’avoir entamé la lutte. Celui qui utilise la force de l’autre la transforme et poursuit sa progression.
Le papier ne refuse pas l’encre, donc on y va gaiement sur les objectifs : « Allez, cette année soyons ambitieux, dépassons les 10 millions d’euros de CA ! Go, go, go ! ».
Comment peut-on imaginer avancer efficacement dans un monde aujourd’hui plus qu’indéchiffrable et impétueux en reposant sa stratégie sur un fantasme, un rêve, une utopie ? Eh oui, les objectifs financiers sont déterminés à partir de ce que l’on sait du passé et de ce que l’on présuppose (ou que l’on espère) de l’avenir. C’est du vent en fait. Cette notion de résultat, comme le combattant qui vise la victoire et rien que la victoire, devient une obsession qui rend aveugle et sourd à ce qui se produit réellement dans le présent.
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IMPERMANENCE
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L’océan de la vie d’une entreprise est un processus vivant, discontinue. C’est une succession de vagues. Rien ne sert de nager contre la vague ou même de tenter de la stopper ! La transformation passe par la capacité à savoir surfer la vague. Ce qui fait la force d’une entreprise, c’est sa dynamique, pas son organigramme. Moins on va chercher à parer à toute éventualité en organisant, planifiant, structurant et plus on élargit le champ des solutions possibles. C’est aller dans le sens du mouvement et pas contre.
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LA FORCE DE L’INTENTION
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On ne gaspille plus d’énergie à élaborer des plans pour ensuite justifier chaque mois pourquoi il sont inopérants. Ici on ne parle plus en termes de résultats mais d’intention.
Quel chemin l’entreprise veut-elle tracer ? Pour quelle raison ? Quel est son grand projet ? Sa raison d’être ? La route, on le sait est semée d’embuches mais qui sont autant d’occasions de se réinventer. C’est accepter de se réajuster sans cesse pour avancer, franchir les obstacles, tomber, se relever, contourner, reculer, …
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COMMENT DONNER VIE AU PROJET D’ENTREPRISE ?
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Par les hommes et les femmes. Une organisation hyper structurée laisse peu de place à l’initiative et à l’expression des talents. On a construit ainsi des générations de gens conformes. Or, à situation exceptionnelle, solution exceptionnelle. Mais comment voulez-vous répondre à l’inattendu en agissant de manière attendue ? Ce ne sont pas les formatages qui vont créer la magie dont a besoin une entreprise. Ce sont les figures libres ! Pour cela, il faut s’intéresser aux talents de chaque collaborateur y compris en dehors de l’entreprise. Comme ce comptable, passionné de sculpture en métal soudé, qui est intervenu en production pour réparer un gros dégât qui aurait nécessité du délais et de l’argent pour être remis en conformité. Là, en dix minutes c’était réglé.
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EN RESUME
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Inutile de perdre du temps à structurer et planifier. Inutile de miser sur des objectifs qui resteront toujours hypothétiques. Comment avancer ? En se synchronisant à ce qui advient. Facile ? Non, c’est ce qu’il y a de plus difficile mais de plus enthousiasmant aussi …
Il s’agit-là du premier post sur LE TAO DANS LES ORGANISATIONS. J’ai commencé à planter le décor. Au fur et à mesure des articles, nous irons plus loin et de façon plus précise pour ressentir la meilleure manière de se synchroniser au mouvement perpétuel.
Bon Qi
J’accompagne les organisations et entreprises sur cette route du TAO. C’est ma contribution à ce grand mouvement perpétuel.
Une fois le projet intime clarifié par le dirigeant, je m’infiltre dans les rouages pour co-construire le nouvel agencement, celui prêt à accueillir sans s’émouvoir ce qui doit être …
Besoin d’infos ?
Photo : Sigrid Vincent
SOURCES :
Les 20 préceptes du KARATE-DO – Gichin Funakoshi
YI JING Taoïste, Le livre de la simplicité – Zu-Hui Yang / Hiria Ottino
Yi JING, le livre des changements – Cyril Javary / Pierre Faure
Conférences et ouvrages sur le TAO — Marc Halévy
FENG SHUI, le guide de référence – Elisabeth Moran, Maître Joseph Yu et Maître Val Biktaschev