—
#2 – LE TAO DANS LES
ORGANISATIONS
—
INTERCONNEXION
(Partie 1)
Dans l’article précédent “Mouvement perpétuel“, nous avons vu que dans le TAO, tout est en mutation constante et tout est relié.
Si l’entreprise fonctionne selon les règles du Tao elle tend vers l’harmonie. Pour ce faire, elle doit être abordée comme un système où tous les rouages sont en interrelation. C’est la clé.
—
UN SYSTEME
—
La médecine chinoise, fondée sur les principes du TAO, considère le corps humain comme un système influencé par son environnement et dans lequel tout est interdépendant pour former un Tout vivant.
C’est ainsi que des troubles du sommeil peuvent être dus, par exemple, à une mauvaise circulation des liquides organiques. Par conséquent, la médecine chinoise ne va pas chercher à soigner un symptôme, une maladie, ici l’insomnie. Elle va s’atteler à renforcer l’énergie vitale pour permettre à la personne de traverser la maladie ou le trouble.
De la même façon, dans l’entreprise tout est interconnecté et sous l’influence de son environnement. Tout a son importance, même et surtout ce qui ne se voit pas. N’oublions pas que ce sont des champs d’énergie invisibles qui donnent naissance et contrôlent la matière visible. Chaque acte que pose un collaborateur a un impact. Pour la dynamique de l’entreprise, chacun doit jouer la même partition. Encore faut-il savoir quel morceau jouer …
C’est la raison pour laquelle, toutes les disciplines sont considérées dans le TAO comme des arts, qu’elles soient scientifiques, artistiques, philosophiques ou métaphysiques. On ne compartimente pas, on ne valorise pas une discipline plutôt qu’une autre. Elles sont interdépendantes pour constituer un Tout cohérent.
Découvrir le taoïsme, c’est accepter de s’ouvrir à une vision plus holistique du monde, plus immanente, plus atemporelle.
—
YIN / YANG
—
Observons l’idéogramme du Qi (image de début d’article).
En bas en bleu ce sont les céréales qui cuisent, c’est le Yin. En haut en rose c’est la vapeur, la chaleur dégagée par la cuisson, c’est le Yang. Le Yin c’est la partie ombragée de la colline, l’ubac et le Yang la partie ensoleillée de la colline, l’adret. Le Yin c’est la matière, le Yang est immatériel.
Le souffle vital qu’est le Qi est ainsi animé par les mouvements incessants du Yin et du Yang qui sont interdépendants, s’opposent, se transforment l’un en l’autre et quand l’un croit l’autre décroît. On les abordent souvent comme une dualité alors qu’ils forment le Tout.
Pour illustrer cette danse du Yin et du Yang, prenons l’exemple d’un combat de karaté.
Vous arrivez au dojo bien fatigué par votre semaine de travail et ce jour-là vous tombez sur un partenaire qui veut en découdre. Il va adopter un comportement très Yang qui va se traduire par une attitude offensive. Une vraie machine à distribuer les atemi (coups) !
Le reflex occidental, animé par la volonté de vaincre (la quête du résultat) nous poussera à adopter également une attitude Yang : « Non mais Oh ! Je ne vais pas me laisser faire. Il va voir de quel bois je me chauffe ! ». Au mieux, les deux se font mal …
Le samouraï s’y prendra autrement. Il va plutôt adopter une attitude Yin. C’est-à-dire que dans un premier temps, il va accepter ce qui advient. Il va parer les coups, esquiver. Mais surtout, pendant ce temps, il va observer, expérimenter. Une fois qu’il aura rempli son logiciel intérieur avec suffisamment d’informations, il va pouvoir riposter. Ces trois phases sont essentielles : ACCEPTER, ABSORBER, TRANSFORMER. Il est impossible de transformer une situation si elle n’a pas été d’abord acceptée.
Si on applique cet exemple en entreprise. Une belle commande client est sur le point de tomber et au dernier moment celui-ci décide de la passer chez un concurrent. Le responsable commercial de ce client va tout de suite chercher à le contacter pour comprendre ce revirement afin de le faire changer d’avis. Et s’il n’y parvient pas, il tente le tout pour le tout en proposant une grosse remise quitte à massacrer la marge. C’est un peu désespéré comme attitude. Est-ce que ça va donner envie au client de revoir sa décision ? Il y a peu de chance. Afficher une vision à court terme, ne rassure pas.
Imaginons maintenant, que, le responsable commercial fairplay contacte le client, simplement pour l’écouter et récolter un maximum d’informations pour … plus tard. Ces données seront précieuses à l’entreprise pour réagencer ses forces et ressources. C’est miser sur la qualité de la relation avec le client. On est là sur une vision à long terme.
Vous me direz peut-être : « Mais on a vraiment besoin de cette commande, sinon on est mal ». Alors c’est justement là qu’il faut aller regarder ce qu’il faudrait revoir pour être en capacité d’accepter cette annulation de commande sans trembler, avec sérénité. Parce que sinon, le même scénario va se répéter sans fin. Si on veut que les choses changent, il faut arrêter de faire pareil.
—
SYNCHRONISATION
—
Pour que l’entreprise soit connectée à son environnement, les collaborateurs à leur entreprise et entre eux, il convient de sortir des objectifs fantasmés et de la planification qui en découle. Il est vain d’imaginer dompter le monde et son évolution. Pour être en harmonie avec le flow, il faut s’y synchroniser.
Qu’est-ce que se synchroniser ? C’est accueillir ce qui advient ici et maintenant et le considérer, non pas en termes de “bénéfique ou néfaste”, de “bien ou mal” mais comme une opportunité. Pas celle de faire un méga coup financier mais celle de se réinventer sans cesse. Les gains économiques, n’en sont pas le but mais la juste conséquence.
Quand on a le nez dans les résultats on se coupe de tout ce qui nous relie aux autres, à l’entreprise, au monde. Dans cette solitude, on a des difficultés à voir les évènements comme des opportunités. Et quand bien même on les verrait, étant déjà bien (pré)occupé, on va décider de s’y atteler plus tard, trop tard.
—
MANAGER = METTRE EN RELATION
—
En cas d’impondérable, batailler pour trouver une solution à la petite semaine, ça ne mobilise pas les foules et les rapports sont pauvres, distendus, rugueux. En revanche, profiter de cet évènement pour co-construire une réponse qui a de la gueule et y prendre plaisir, c’est autre chose !
C’est en ça que le manager est utile, à créer l’enthousiasme qui reconnectera les gens entre eux. Pour cela, il devra connaître et porter le projet de l’entreprise. C’est un autre sujet …
—
EN RESUME
—
Dans la valse incessante des mouvements Yin-Yang, le Yang est le processus qui construit, organise, fait émerger, active tandis que le Yin est celui qui apaise, dilue, uniformise. L’un n’est pas mieux que l’autre. Ils sont complémentaires et indissociables.
Etre en éveil sur ce qui nous entoure, ce qui se produit, sans jugement, nous offre la possibilité de tracer notre route en tirant parti de ce que la réalité nous présente à chaque avancée. C’est faire preuve de lucidité.
Etre relié à la Nature, au Tout nous ouvre naturellement au monde, à l’entreprise, aux autres. Pour être interconnecté, il faut être connecté.
L’entreprise est donc un système où tous les éléments se complètent, sont interdépendants et se renforcent les uns avec les autres au service d’un grand projet.
Les vagues sont innombrables, l’océan unique …
Il s’agit-là du deuxième post sur LE TAO DANS LES ORGANISATIONS. Au fil des articles, je vous invite progressivement et tranquillement à vous plonger dans cette énergie mouvante et impermanente.
Bon Qi
J’accompagne les organisations et entreprises sur cette route du TAO. C’est ma contribution à ce grand mouvement perpétuel.
Une fois le projet intime clarifié par le dirigeant, je m’infiltre dans les rouages pour co-construire le nouvel agencement, celui prêt à accueillir sans s’émouvoir ce qui doit être …
Besoin d’infos ?
Photo : Sigrid Vincent
SOURCES :
Les 20 préceptes du KARATE-DO – Gichin Funakoshi
YI JING Taoïste, Le livre de la simplicité – Zu-Hui Yang / Hiria Ottino
Yi JING, le livre des changements – Cyril Javary / Pierre Faure
Conférences et ouvrages sur le TAO — Marc Halévy
FENG SHUI, le guide de référence – Elisabeth Moran, Maître Joseph Yu et Maître Val Biktaschev